Ces dernières années, la requalification de certaines plateformes logistiques en « établissement industriel » s’était traduite par une hausse parfois très brutale des impôts locaux, forcément mal ressentie par les entreprises concernées. Sous la pression du secteur, la loi pose désormais des garde-fous.
Tout est parti d’un article ambigu du Code général des impôts qui définit la règle de calcul de la cotisation foncière des entreprises (CFE) applicable aux sites industriels. Faute de définir clairement cette dernière notion, le texte a servi d’assise juridique aux autorités fiscales pour requalifier comme tels certains bâtiments jusqu’ici considérés comme de simples « locaux professionnels » : ici un entrepôt de stockage, là une plateforme de logistique e-commerce. Avec des conséquences financières très importantes pour les intéressés puisque le passage d’une catégorie à l’autre entraîne une hausse parfois substantielle du montant de la contribution (jusqu’à +400%, dans les cas les plus extrêmes, selon la Fédération Nationale des Transports Routiers). Sur le terrain, ce tour de passe-passe fiscal a été d’autant plus mal vécu que les motifs invoqués par les autorités administratives pour procéder à ces redéfinitions légales reposent sur une jurisprudence évasive autorisant des interprétations d’ordre matériel : l’utilisation au sein d’un entrepôt d’équipements de manutention et de machines de levage suffit, aux yeux des contrôleurs, à en faire un local affecté à « une activité industrielle ».
Un seuil à 500 000 euros d’équipements
Sous la pression d’organisations professionnelles, comme la FNTR (citée plus haut), l’Union des Entreprises Transport et Logistique de France (TLF), la Confédération Française du Commerce de gros et International (CGI) et des syndicats patronaux (Medef, CPME), le gouvernement a introduit dans son dernier projet de loi de Finances une série de mesures visant à préciser, clarifier et réguler a minima la notion d’immobilisations industrielles.
La plus marquante de ces dispositions fixe à 500 000€ d’outillage et de matériel le seuil à partir duquel un « établissement peut être classé dans cette catégorie fiscale » (en-dessous de cette valeur, l’entreprise de prestation logistique reste incluse dans l’assiette applicable aux locaux professionnels). Le PLF 2019 prévoit également « un lissage sur 6 ans du montant des contributions à verser lorsqu’une requalification a entraîné une hausse de l’imposition ». Enfin, la loi introduit « un principe de non rétroactivité des requalifications sur les trois années précédentes ». Toutefois, le secteur n’a pas obtenu satisfaction sur les tous les points : non seulement le droit qu’accorde la jurisprudence au fisc de requalifier les entrepôts de stockage demeure, mais il est désormais inscrit dans la Loi.
Enfin, les aménagements appliqués depuis le mois janvier le sont à titre transitoire, le temps qu’un rapport d’évaluation mesure leurs conséquences (éventuelles) sur les finances des collectivités locales qui encaissent la CFE et les taxes foncières. Ce document, qui sera remis au Parlement au printemps 2020, « servira de base aux modifications à apporter au régime fiscal des bâtiments de prestations logistiques » indique la FNTR.