Beaucoup de e-commerçants spécialisés en cosmétique s’interrogent sur l’éligibilité ou non de leurs produits au droit de rétractation renforcé par la Loi Hamon de 2014.
Après un démarrage poussif lié à une réglementation plus stricte que dans d’autres secteurs, la vente en ligne des produits relatifs à la santé et à la beauté monte en puissance : d’après les derniers chiffres de la Fevad, ce marché continue à progresser (28,5% d’e-acheteurs) et talonne désormais, en nombre de clients, celui de l’électroménager. En 2017, une mesure réalisée par la cabinet d’études NPD faisait état d’une très forte hausse de vente de maquillage sur internet (+44%), devant les soins de beauté (+29%) et les parfums (+22%).
Droit de rétractation : une liste dérogatoire
Cette offre e-commerce a une spécificité par rapport à beaucoup d’autres : son cadre normatif est formé par une série de dispositions relevant de trois textes officiels, le Code du Commerce bien sûr, le Code de la Consommation et le Code de la Santé Publique. Ce dernier, dans son article L.5131-1 , fixe même une définition légale du produit dit « cosmétique », entendu comme « toute substance ou mélange destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (épiderme, systèmes pileux et capillaire, ongles, lèvres et organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales, en vue, exclusivement ou principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ».
Ces considérations particulières amènent de nombreux vendeurs à s’interroger sur la validité du fameux droit de rétractation de 14 jours sur leurs marchandises. En sont-ils exempts dès lors que la loi inclut, dans une liste dérogatoire, « les biens qui ont été descellés par le consommateur après la livraison et qui ne peuvent être renvoyés pour des raisons d’hygiène ou de protection de la santé » ? (article 121-21-8 du Code de la Consommation). La question est importante dans la mesure où elle conditionne aussi la politique de gestion des retours e-commerce à mettre en œuvre dans n’importe quel entrepôt de stockage par où transite ce type de colis.
Informer le consommateur
Bien qu’aucun texte ne les mentionne de manière explicite (seul un arrêté du 30 juin 2000 établit un inventaire précis des produits cosmétiques sans déterminer lesquels ont un éventuel caractère sanitaire ou des vertus thérapeutiques ou hygiéniques), entrent potentiellement dans cette catégorie les médicaments et solutions de parapharmacie, certaines crèmes, lotions et poudres, les sprays de toute nature (déodorants, anti-transpirants) les lingettes et autres produits d’hygiène personnelle.
En l’absence de jurisprudence claire sur le sujet (du moins pour le moment), la difficulté pour le e-commerçant désireux de dispenser toute ou une partie de son offre « cosmétique » du droit de rétractation, est de prouver que les marchandises concernées présentent bien des « caractéristiques hygiénique et de santé ». Dans le doute, le recours préalable à des médecins, nutritionnistes et autres diététiciens reste une précaution : leurs avis ou articles suffisent parfois à attester que les produits commercialisés entrent dans la bonne « case »*.
Toutefois, rien n’est jamais sûr dans la mesure où l’interprétation de la loi reste à l’appréciation du juge, le seul à pouvoir à trancher un litige entre un particulier et une entreprise. Il est donc plutôt conseillé aux professionnels d’être prudents et, à défaut de règles irréfutables, de satisfaire aux contraintes légales de la Loi Hamon et du Code de la Santé publique qui l’oblige aussi à informer le consommateur sur la provenance, la composition et les effets de ses produits.
*Certains e-commerçants préfèrent s’en tenir, à la lettre, au texte de l’article 121-21-8 du Code de la Consommation qui pose le principe qu’un article à caractère hygiénique n’est pas retournable, dès lors qu’il est descellé après sa réception. Rappelons que la loi exempte du droit de rétractation « les biens susceptibles de se détériorer ou de se périmer rapidement ».